Voici une dure réalité. Au cours de votre existence, vous connaitrez au moins une crise majeure. Un choc brusque et chaotique qui bouleversera votre vie. Une crise financière, une épidémie, une maladie, une catastrophe naturelle, une faillite, une dépression, un burn-out…

Ces chocs font peur. On les redoute, on prie pour qu’ils n’arrivent jamais. Mais ils font partie intégrante de la vie et sont souvent imprévisibles et hors de notre contrôle. 

Alors comment s’y préparer au mieux ? 

Dans son livre « Antifragile : Les bienfaits du désordre », Nassim Nicholas Taleb recommande d’être antifragile. Il explique qu’être antifragile aide non seulement à traverser plus sereinement ces moments difficiles mais que cela permet même d’en tirer profit. 

Découvrez ce qu’est l’antifragilité et comment le devenir.

Qu’est-ce que l’antifragilité ?

On sait tous ce qu’est la fragilité. Un objet fragile est un objet se casse facilement. Un verre en cristal par exemple est fragile. Si vous le laissez tomber, il se brisera en mille morceaux. De même une personne fragile émotionnellement est une personne qui craquera facilement face à l’adversité.

De manière générale, la fragilité renvoie à l’idée que quelqu’un ou quelque chose craint les imprévus, les chocs et le chaos. 

L’antifragilité c’est tout l’inverse. C’est lorsque quelqu’un ou quelque chose se renforce quand il est exposé à des facteurs de stress, des chocs, de la volatilité, du bruit, des erreurs, des fautes, des attaques, ou des échecs.

La notion d’antifragilité est différente de la résilience ou de la robustesse. Quelque chose de résilient résiste aux chocs mais reste inchangé – comme un Phoenix qui renait de ses cendres – alors que quelque chose d’antifragile s’améliore face à ces chocs – comme l’Hydre de Lerne dont la tête repousse en double à chaque fois que l’une d’entre elles est coupée.

On pourrait donc résumer ces termes ainsi :

  • Fragile : craint les imprévus, les chocs et le chaos
  • Robuste : résiste aux imprévus, aux chocs et au chaos
  • Antifragile : bénéficie des imprévus, des chocs et du chaos

Il existe une multitude d’exemples d’antifragilité dans des domaines très variés. En voici quelques-uns.

L’antifragilité en sport

Le principe même du sport est de faire subir à votre corps un stress pour le renforcer. Pendant l’effort, certaines fibres musculaires subissent de minuscules déchirures que votre corps reconstruit ensuite pendant le repos pour les rendre plus fortes et plus résistantes.

Ce processus de régénération, vous permet de gagner en performance. C’est ce qui fait que vous gagnez en masse musculaire, que vous êtes capable de courir plus longtemps ou que vous pouvez soulever des poids de plus en plus lourds. Tous ces petits stress vous renforcent.

On observe le même phénomène dans les sports de combat et les arts martiaux. Quand vous démarrez ces activités, les coups font mal parce que votre corps n’est pas habitué. Mais à force de vous entrainer et de prendre des petits chocs, vos os se renforcent. On appelle cela l’endurcissement. Le but de l’endurcissement c’est justement de stresser l’os pour qu’il puisse augmenter sa densité et devenir plus résistant. 

L’antifragilité du cerveau

Le cerveau est aussi un bon exemple d’antifragilité. Certaines parties de votre cerveau (notamment les noyaux de la base) contiennent vos schémas mentaux c’est-à-dire vos habitudes, vos réactions, vos croyances, vos goûts ou encore vos valeurs.

Quand vous êtes exposé à un stress négatif, comme un stress émotionnel, une douleur, une déception, le schéma mental qui en est responsable est endommagé. Il finit alors affaiblit ou s’efface complètement de votre cerveau.

A l’inverse quand vous êtes exposé à un évènement positif comme une émotion positive, du plaisir ou une bonne surprise, le schéma mental se renforce.

Prenons un exemple simple d’un enfant qui adore le chocolat au point d’être capable d’engloutir un éclair au chocolat et une forêt noire au cours d’un seul et même repas. Si un jour cet enfant fait une crise de foie, le chocolat pourrait l’écœurer. Il en mangerait peut-être encore, mais en très faible quantité. A cause d’une douleur physique (crise de foie), ses goûts ont changé et c’est une bonne chose pour sa santé en générale. 

Chaque expérience, qu’elle soit positive ou négative, nous est bénéfique puisqu’elle nous permet de mettre à jour nos schémas mentaux et de nous adapter à notre environnement.

L’antifragilité dans l’art

Au Japon il existe un art qui s’appelle l’art du Kintsugi et qui consiste à recoller les morceaux d’une vaisselle cassée avec une laque recouverte d’une poudre d’or. On obtient alors un magnifique résultat où les fêlures deviennent des motifs en or. 

La vaisselle, pourtant fragile, finit alors par devenir antifragile parce qu’elle prend plus de valeur après avoir été cassée. Plus le nombre de fêlures est important, plus la quantité d’or utilisée pour réparer l’objet devient elle aussi importante ce qui augmente par la même occasion son prix. 

L’antifragilité en finance

Quand vous constituez un portefeuille boursier, tout l’enjeu est d’investir sur un ensemble d’actifs qui maximise vos gains et limite vos pertes. C’est en respectant ce principe fondamental que vous êtes capable de bénéficier de l’effet des intérêts composés.

Actif fragile :

  • Va rompre avec le désordre
  • Peu de potentiel de hausse
  • Potentiel de baisse élevé

Actif antifragile

  • Prospère avec le désordre
  • Potentiel de hausse élevé
  • Faible risque de baisse

Les caractéristiques d’un actif antigragile peuvent faire penser aux métaux précieux tels que l’or ou l’argent. De plus, le Bitcoin – qui est souvent considéré comme « l’or numérique » peut aussi en faire partie. En effet, son offre limitée dans le temps est l’une de ses principales similitudes avec les métaux précieux. Le «white paper» publié avant son lancement en 2009 stipule que la production de bitcoin serait plafonnée à 21 millions en 2140. Aujourd’hui, 90% des jetons ont déjà été minés. On estime qu’il existe moins de 0,4 bitcoin par millionnaire sur la planète. Un ratio amené à baisser, puisque le nombre de millionnaires progresse plus vite que l’augmentation du nombre de bitcoin en circulation. Le processus d’introduction de nouveaux bitcoins dans l’économie est donc à l’opposé des monnaies fiduciaires, pour lesquelles une quantité illimitée de billets est actuellement imprimée. Le bitcoin est aujourd’hui plus rare que l’or et possède une tendance déflationniste qui le fera passer d’une croissance de l’offre de 1,8% à 0,9% dans quatre ans et à seulement 0,4% dans les quatre années suivantes.

Le bitcoin est apparu au moment où l’un des plus grands « cygnes noirs » a frappé l’économie américaine et mondiale : la grande crise financière de 2008. 

Le bitcoin a survécu à de nombreuses erreurs, à des chocs et même à ce qu’on appelle des «hard fork». Le bitcoin a été déclaré pour mort à de nombreuses reprises. Le minage de bitcoin a été interdit dans plusieurs pays, provoquant la fermeture immédiate d’immenses fermes de minage et ce sans aucune conséquence sur le fonctionnement du réseau Bitcoin.

Tous ces événements et attaques n’ont pas arrêté le développement et l’adoption du bitcoin. La cryptomonnaie devient plus forte avec chaque bloc déposé. Toutes les 10 minutes, la sécurité de toutes les transactions effectuées sur les blocs précédents est renforcée. Au cours de chaque période de quatre ans entre les «halvings», la valeur du bitcoin a augmenté.

Comment être antifragile ?

Exposez-vous à des petits chocs réguliers. Une personne qui n’est pas régulièrement exposée à de petits chocs devient fragile.

C’est le cas des personnes dont les parents sont surprotecteurs. Quand des parents couvent à l’excès leurs enfants en leur interdisant de faire certaines choses ou en les assistant en permanence, ils les fragilisent sans le vouloir. Car ils créent un cadre hermétique qui les empêche de faire leurs propres expériences. Les enfants vivent alors dans un cocon protecteur.

Le problème c’est que quand ils sortent de ce cocon pour entrer dans le vie active, ils n’y sont pas préparés. Ils manquent d’autonomie et d’indépendance. Et la chute est généralement brutale. 

C’est pour cette raison qu’il est important de créer un cadre dans lequel les enfants peuvent expérimenter, commettre des erreurs et apprendre. Et c’est aussi vrai à l’âge adulte. En fait tout au long de votre vie vous devez vous exposer à de petits chocs réguliers. Car ces petits chocs vous renforcent et vous permettent d’en encaisser de plus gros dans le futur. 

Alors en quoi consistent ces petits chocs exactement ?

Et bien ils consistent à sortir régulièrement de votre zone de confort et à tenter de nouvelles expériences. Pour devenir antifragile, vous devez volontairement vous mettre dans une position d’incertitude et de doute pour vous exposer à de nouvelles situations auxquelles vous n’êtes pas habitué. C’est comme ça que vous vous renforcerez.

Adoptez la stratégie « des haltères »

La stratégie des haltères est une stratégie financière qui consiste à investir la majorité de son capital dans des actifs peu risqués qui ont des gains modérés et à investir le reste dans une petite portion d’actifs très risqués mais dont les gains peuvent être très importants. Cette stratégie permet de rester conservateur tout en s’exposant à d’importants gains potentiels, le tout pour un risque très limité.

On l’appelle la stratégie « Barbell » parce que la répartition du capital ressemble à la répartition des poids qu’on retrouve sur des haltères.

La barre et les fontes les plus lourdes représentent les actifs à faible risque, ceux qui pèsent le plus lourd dans le portefeuille, et les plus petites fontes légères représentent les actifs risqués à haut potentiel, ceux qui pèsent le moins.

Cette stratégie qu’on retrouve dans la finance s’avère aussi utile dans bien d’autres domaines.

Si vous cherchez à optimiser votre temps par exemple, investissez la majorité de votre temps sur des tâches qui vous garantissent des résultats (les 20% d’efforts qui produisent 80% des bénéfices) et passez une minorité de temps sur des petites expériences dont vous n’êtes pas sûr des résultats mais qui peuvent vous être potentiellement très bénéfiques. 

La stratégie Barbell peut aussi s’appliquer à l’entrepreneuriat. Si vous voulez développer une entreprise tout en limitant le risque, vous pouvez démarrer votre activité en parallèle de votre travail à temps plein. Vous garderez la sécurité de l’emploi tout en vous aventurant dans un projet incertain mais dont les gains potentiels peuvent être important.

Note : Quand vous ne dépendez que d’un salaire pour vivre, vous êtes fragile par définition. A la moindre crise financière ou faillite, vous pouvez potentiellement vous retrouver sans emploi et donc sans revenu. En diversifiant vos sources de revenus, vous deviendrez alors antifragile.

Cherchez la simplicité

Plus une chose est complexe, plus elle est imprévisible et moins on est en mesure de la maitriser. 

Pour expliquer ce point, Nassim Nicholas Taleb prend l’exemple de la livraison de gros projets d’envergure. Voilà ce qu’il dit :

Le monde d’aujourd’hui devient de moins en moins prévisible et on dépend de plus en plus des technologies qui ont des erreurs et les interactions sont plus difficiles à estimer et encore moins à prédire.

Ce que Taleb explique ici c’est qu’en ayant codifié, institutionnalisé et modernisé nos process, on a par la même occasion complexifié les choses. On a rendu les processus plus imprévisibles et donc plus fragiles. 

Pour devenir antifragile, vous devez faire l’inverse. Vous devez chercher à vous simplifier la vie au maximum. 

Alors comment faire concrètement ?

Et bien vous pouvez par exemple :

  • Rembourser vos dettes pour éliminer le stress financier
  • Ne pas contracter de crédit à la consommation, épargner puis investir
  • Vous débarrasser de tous les objets et gadgets qui vous encombrent
  • Faire du sport régulièrement 
  • Vous éloignez des influences négatives
  • Remplacer de mauvaises habitudes par de bonnes habitudes
  • Développer de multiples sources de revenus

Toutes ces choses renforceront votre vie présente mais aussi future.

Apprenez de vos erreurs

Les personnes qui n’apprennent jamais de leurs erreurs sont fragiles car elles ne profitent pas de leurs maladresses pour s’améliorer et se renforcer. 

Pourtant les erreurs apportent de précieuses informations. Elles vous indiquent ce qui ne fonctionnent pas, ce qu’il ne faut pas faire ou encore ce qui est faux. Et si vous prenez le temps de les analyser, elles vous aident à optimiser vos stratégies, vos approches, votre état d’esprit, vos modèles mentaux, vos croyances… 

Conclusion

L’antifragilité est un concept puissant parce qu’il nous montre non seulement comment résister aux chocs mais aussi comment en tirer profit.

Pour rappel pour devenir antifragile vous devez :

  • Vous exposer à de petits chocs réguliers
  • Adopter la stratégie des haltères pour maximiser les gains et diminuer les pertes
  • Chercher la simplicité dès que possible
  • Apprendre de vos erreurs en adoptant l’amélioration continue

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